Portrait de Noël : Alain Sars
À 14 ans déjà, il faisait la une des quotidiens régionaux et éveillait la curiosité des radios locales. Plus jeune arbitre de France en 1975 grâce à une dérogation spéciale de la Commission d’arbitrage, il dirige les plus jeunes catégories jusqu’aux U19. Dérogation qui fera quelques années plus tard jurisprudence avec le changement du règlement des arbitres en France. « À cette époque, on ne pouvait pas être arbitre avant 18 ans. J’ai eu la possibilité de passer l’examen d’arbitre à l’âge de 14 ans et dans lequel j’ai fini major de promotion. » Comme un signe du destin pour celui qui sera plusieurs fois désigné comme meilleur arbitre de Ligue 1 au début des années 90 par l’Union nationale des footballeurs professionnels. Avant la saison 2011/2012 et l’arrivée de Benoît Bastien dans le giron des arbitres de Ligue 1, Sars était le dernier homme en noir lorrain à avoir foulé les pelouses du championnat de France. De la finale de Coupe de Lorraine en 1987, son premier match au sommet, et la demi-finale de Ligue des Champions entre le Milan AC et le FC Barcelone en 2006 pour le dernier match international de sa carrière, Alain Sars compte 252 matches de Ligue 1 et 89 matches internationaux dirigés dont 35 en Ligue des Champions.
« Ils m’ont volé ma Coupe du monde 2006 »
D’abord arbitre assistant (anciennement arbitre de touche) de Gérard Biguet* lors de la saison 1988-1989, Alain Sars découvre la Ligue 2 en janvier 1991 avant de passer dix mois plus tard en Ligue 1, à 30 ans ! « C’est vrai que j’ai eu la chance de tout découvrir tôt dans ma carrière. Cela s’est toujours bien passé avec les joueurs et les médias, quelque soit mon âge et mon expérience. Aujourd’hui, je suis fier que les supporters gardent un bon souvenir de moi même six ans après la fin de ma carrière. » Le surdoué de l’arbitrage ne prendra pas beaucoup de temps à s’imposer auprès des acteurs de la Ligue 1 : élu meilleur arbitre trois années de suite par l’UNFP (de 1992 à 1994), Alain Sars n’a pourtant pas été chercher son trophée la dernière année. « La Direction nationale des arbitres avait demandé à l’UNFP d’élire elle-même l’arbitre de l’année et non par le biais des joueurs de Ligue 1. L’UNFP a refusé, j’ai été élu pour la troisième année consécutive et la DNA m’a demandé de ne pas aller chercher la récompense pour éviter qu’il y ait des problèmes au sein des arbitres. » Jalousie et politique contaminaient déjà le monde des arbitres dans les années 90 et Alain Sars en paiera le prix fort. Meilleur arbitre français, fort de deux quarts de finale et de deux demi-finales de Ligue des Champions en 2006, c’est pourtant Éric Poulat qui sera désigné pour officier à la Coupe du monde 2006 en Allemagne. « Je n’ai jamais été l’ami de Michel Vautrot ni de Marc Batta qui ont dirigé et dirige la DNA car j’ai toujours pensé que les nominations devaient se faire au mérite et non par copinage. Je suis amer pour la Coupe du Monde 2006 car j’avais une très bonne cote auprès des instances internationales. Je n’ai pas peur de dire qu’ils m’ont volé ma Coupe du monde. » Jamais nommé lors des championnats d’Europe, ni des Coupes du monde, Alain Sars a néanmoins dirigé des matches lors d’événements mondiaux exceptionnels comme la Coupe d’Afrique des Nations en 2000 ou encore le championnat du monde des clubs en 2006. Mais pas d’Euro ni de Coupe du Monde… « Je suis le Poulidor de l’arbitrage français. Toujours placé, jamais vainqueur (rires). »
Aujourd’hui consultant pour RTL et Canal Plus
Parmi ces grands souvenirs d’arbitres se mêlent les histoires humaines (Bosnie-Grèce en avril 1997 pour le premier match officiel de la Bosnie dans une ex-Yougoslavie marqué par la guerre), rencontres au sommet (Brésil-Argentine au Maracana devant 100 000 personnes en 1998) et derbies électriques (onze PSG-OM dirigés !). L’année de sa retraite obligatoire (à 45 ans révolu), en 2006, Alain Sars est passé à un brin d’herbe d’arbitrer la finale de l’Europa League, point d’orgue d’une carrière exceptionnelle. « J’étais numéro 2 derrière l’Allemand Herbert Fandel. Et comme un club allemand, Schalke 04, jouait sa place en finale à Séville, j’étais susceptible d’être nommé en cas de qualification du club de la Ruhr. Et le FC Séville se qualifie dans les prolongations. » Le sort qui s’acharne après l’échec de la Coupe du Monde ? « Non, je vois cela plutôt comme un signe du destin. En n’officiant pas à la Coupe du Monde, j’ai eu la possibilité de devenir consultant pour M6 puis par Canal Plus. » Aujourd’hui cadre technique régional au sein de la Ligue Lorraine de football, Alain Sars continue avec plaisir son rôle de consultant sur Canal Plus et depuis quelques temps sur RTL aux côtés de Christophe Pacaud. En même temps, le meilleur arbitre français de ces vingt dernières années dans la première radio de France, ça semble logique non ?
*Gérard Biguet a été arbitre international de 1982 jusqu’en 1992. Il a arbitré de nombreux matchs internationaux, comme la finale des Jeux olympiques de 1988 à Séoul. Il a également officié un match des Championnats d’Europe 1992 en Suède et pour deux finales de Coupe de France en 1985 et 1990.
Photos : DR - Article publié le 30 décembre 2012