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Les présidents se rebiffent : Le combat des chefs

Depuis les années 90 et la période Bernard Tapie – Claude Bez, le championnat de France n’avait pas connu une telle effervescence chez les présidents de Ligue 1. Entre l’omniprésence dans les médias de Jean-Michel Aulas, les saillies toujours plus saignantes de Louis Nicollin ou les problèmes relationnels de Waldemar Kita, les patrons de la L1 font les gros titres. Pour mieux exister ?

Montpellier  : Louis Nicollin, tireur d’élite

Ce bon vieux Loulou. À chaque sortie médiatique, c’est la même. Langage fleuri, attaques saignantes et règlements de comptes à OK Corral. Cette saison, tout le monde y est passé : les joueurs, les recrues, la cellule de recrutement et l’entraîneur. Tout le monde sous le même régime. Par le passé, Rolland Courbis, Jean Fernandez ou René Girard en avaient pris pour leur grade également, souvent pour des résultats décevants ou des choix discutables. Pour Loulou, pas de limite. En septembre dernier, le président héraultais évoquait le travail médiocre de sa cellule de recrutement emmenée par l’ancien capitaine de la Paillade, Bruno Carotti. « J’en veux à la cellule de recrutement, Carotti en tête. Je n’aime pas les incompétents. Le patron, c’est moi et c’est moi qui commande. Il n’y a pas spécialement le feu. Mais il y a des choses qui me déplaisent. Il y a des gens qui font le recrutement qui sont des grosses bites (sic). Je m’excuse de parler comme ça, mais c’est vrai. » Après son staff, c’est aux joueurs que le président Nicollin s’en est pris en octobre. « Notre plus grand bonheur serait de descendre en deuxième division pour épurer tous ces comiques. Parce qu’il y a une bande de clowns, ça fait peur. » Le départ à la retraite – pas définitive finalement – du défenseur belge Anthony Vanden Borre, était l’occasion d’un savoureux tacle : « Sa retraite ? Je n’en ai rien à foutre. Je veux savoir qui a amené ce joueur ici car c’était un mauvais joueur. On l’avait pris pour remplacer Deplagne et c’est Deplagne qui joue. De toute manière, je ne crois pas à sa retraite, c’est du pipeau. Il veut juste retrouver sa liberté pour signer où il veut. » Pour finir, c’est son ancien coach, Frédéric Hantz, qui a eu le droit à son invective. « Je me pose des question sur le coaching (…) Je commence à en avoir plein le cul. On a pas les moyens de le licencier (Hantz) mais c’est à lui de faire son boulot. Il est susceptible ? Il ne pense qu’à sa gueule ! Durant la conf’ de presse, il aurait mieux valu qu’il parle de son équipe qui avait été pitoyable à Nantes en Coupe de la Ligue (3-1). Après la trêve, on perd encore, on en prend cinq à Lyon, et il faudrait le décorer de la Légion d’honneur ?La mode, ce n’est pas qu’il s’en aille mais qu’il se fasse virer pour toucher des sous. Et si on descend en L2, il aura l’excuse d’avoir été traumatisé par ça mais il ira au bout !» Finalement pas. Hantz sera remplacé par Jean-Louis Gasset fin janvier. Montpellier, ou le monde des Bisounours.

Lyon : Jean-Michel Aulas, la morale et la vertu

Jean-Michel Aulas a habitué le championnat de France de Ligue 1 à s’ériger en modèle de morale et de vertu, portant haut le glaive de la justice pour défendre des intérêts collectifs… tant que ça ne dépasse pas le cadre de l’Olympique Lyonnais. Chef d’entreprise de talent et président qui a su faire de Lyon une place forte en Europe, Jean-Michel Aulas aime trop la lumière pour rester en retrait. Tout est prétexte à faire une sortie médiatique, de la réduction de suspension d’un joueur d’une autre équipe – en l’occurrence Zlatan Ibrahimovic – à la stratégie de recrutement d’un autre club en passant par la méthode de réévaluation de salaire de l’un de ses joueurs (Alexandre Lacazette). Pour Aulas, tout est bon pour être au milieu de l’arène. Quitte à faire beaucoup d’ombre à son propre entraîneur. Si, par deux fois, Jean-Michel Aulas a directement impliqué son coach en invoquant des « problèmes tactique » et un débat entre 4-3-3 et 4-4-2, le président lyonnais a pu également souligner les choix de son coach, notamment concernant sa défense, Nicolas Nkoulou et Mapou Yanga-Mbiwa peinant à s’entendre en début de saison. Il avait répondu par une critique indirecte pour son entraîneur : « Pendant ce temps, Emanuel Mammana se morfond sur le banc. » Mais les apparitions médiatiques de Jean-Michel Aulas ne s’arrêtent pas qu’aux problèmes internes mais également aux sujets évidemment plus graves comme les derniers incidents de Metz-Lyon. Après avoir eu peur pour son gardien de but et son médecin au stade Saint-Symphorien, après avoir été en colère contre le public messin et l’arrêt de ce match, Jean-Michel Aulas a œuvré auprès des instances de la Ligue de football professionnel, pour obtenir une victoire sur tapis vert en plus de sanctions à l’encontre du FC Metz et – forcément – de son stade. Il a eu – en partie – gain de cause. Huis clos, points en moins pour Metz et… ô rage, ô désespoir… match à rejouer. Les incidents de Metz-Lyon ne sont pas des incidents isolés. Cette fois, c’est l’Olympique Lyonnais qui se retrouve dans la peau du coupable. Des pétards et bombes agricoles ont été entendus dans le parcage lyonnais à Caen, lors de la 20e journée. Certes les incidents n’ont pas provoqué l’interruption du match ni de blessure chez les joueurs, mais le gardien Anthony Lopes aurait pu être touché, une fois de plus. En cas de rapport de l’arbitre ou du délégué de la rencontre, le cas de l’OL pourrait atterrir entre les mains de la commission de discipline de la LFP. Sachant que Metz avait écopé d’un retrait de trois points, dont un avec sursis, on imagine que Lyon n’échappera pas à une demande d’explication sérieuse, voire à une sanction. Et là, paradoxalement, on n’a plus trop entendu le président Aulas… De sanction il n’y aura… pas.

Nantes : Waldemar Kita, je t’aime moi non plus

Pour Waldemar Kita, le bien-être dans le couple président-entraîneur est un art que le président nantais maîtrise mal. Très mal. Les deux derniers entraîneurs en date peuvent témoigner de la curieuse façon de communiquer du président, en place à Nantes depuis 2007. Michel Der Zakarian et René Girard ont connu un passage pas toujours très simple à La Beaujoire, attaqué par un Waldemar Kita impatient et souvent critique. Première cible, Michel Der Zakarian, coach des Canaris entre 2012 et 2016 : « Il a pleuré pour travailler chez moi, j’ai payé pour l’avoir (il était à Clermont) et il m’a embrassé quand il a signé à Nantes. Ensuite, il a sali ma famille en disant qu’il ne voulait plus travailler avec la famille Kita, tout ça parce qu’après trois ans je n’ai pas voulu renouveler son contrat. Je voulais tout simplement savoir sa philosophie pour le futur. Il partait en vacances pendant trois semaines, il était impossible de le joindre au téléphone et je devais m’occuper du recrutement. » Deuxième guéguerre avec un second entraîneur. René Girard, cette fois, s’est exprimé sur la façon dont se sont déroulées les choses entre son arrivée sur les bords de Loire en juillet 2016 jusqu’à son limogeage en décembre. « Kita est fort pour retourner les choses en sa faveur. Le premier à lâcher, c’était lui. Il m’a berné, j’étais venu avec un projet de club. Nous avons perdu onze joueurs à la trêve et nous n’en avons pris que cinq. Moi, j’ai dit au président qu’il était hors de question de fonctionner comme ça. C’est le genre de situation qui coupe vite la confiance entre les uns et les autres. Au pays des menteurs, les menteurs sont rois. Kita est un menteur, oui ! » Connu pour entretenir des relations tumultueuses avec son encadrement et les supporters, Waldemar Kita avait déjà décidé, en 2012, de ne pas verser d’indemnité à son coach d’alors, Landry Chauvin, qui, lui, ne voulait pas démissionner. Les deux hommes ne se sont plus parlés pendant les derniers mois de cohabitation. Le bouillant Sergio Conceiçao connaîtra-t-il meilleur sort ?

 

Metz : Bernard Serin, le « Tchad gate » et le Bataclan

Cette saison n’est pas de tout repos pour le président du FC Metz. Premier épisode en date, en septembre, avec l’annonce de l’identité de son nouveau sponsor maillot. Bernard Serin, président du club lorrain, était entouré du ministre tchadien des Sports et de celui des Mines et de la Géologie pour annoncer que le pays africain, surnommé l’« Oasis du Sahel » s’afficherait sur la tunique pour les trois prochaines années. Une promotion pas forcément du goût de tout le monde au cœur d’une nation en proie à une crise économique et financière violente, 122e PIB mondial selon les calculs du Fonds monétaire international en 2013. Le ministre des Sports tchadiens précisait que les négociations ont été menées entre le club et LC2 International Afnex, groupe de presse panafricain dirigé par Christian Lagnidé, joueur messin dans les années 80, et non la nation tchadienne. Un procédé confirmé par Serin : « Dans le cadre du lancement d’une chaîne de télé, le groupe LC2 a convenu avec le Tchad d’assurer sa promotion à l’étranger. D’où cette offre de partenariat. Afin de m’assurer que cet État était totalement impliqué, j’ai insisté pour que ses gouvernants soient associés à l’officialisation. Cela explique pourquoi cela n’a été fait que lors du troisième match. Cela a pu créer au Tchad une petite confusion mais, c’est bien avec LC2 que j’ai signé le contrat. » Cas réglé… louche… mais réglé. Dernière affaire en date, l’allusion maladroite au Bataclan après les incidents de Metz-OL, qui a provoqué incompréhension et réaction – forcément – de Jean-Michel Aulas. « J’oserais presque vous dire que c’est, en l’occurrence, comme si, il y a quinze mois, la justice avait condamné le Bataclan », avait réagi Bernard Serin suite aux sanctions à l’encontre de son club. Le parallèle avec les attentats survenus le 13 novembre 2015 dans la salle de concert parisien a fait grincer des dents. Y compris celles du président lyonnais : « J’ai lu les déclarations de mon homologue de Metz. Elles me font pleurer réellement parce que je trouve que le football ne doit jamais nous emmener sur des terrains aussi sordides que ceux abordés hier. » Et Serin de répondre : « Je suis choqué de lire et d’entendre depuis hier soir que j’ai souhaité comparer les événements qui se sont déroulés au Stade Saint-Symphorien le 3 décembre, qui n’ont eu pour conséquence qu’une blessure légère, à ceux, tragiques, qui ont ensanglanté le Bataclan et Paris en novembre 2015. A aucun moment, je n’ai pu avoir cette stupidité ou ce manque de recul malsain et indécent. Je n’ai pas comparé les faits eux-mêmes, qui sont clairement incomparables, j’ai comparé mon impuissance d’organisateur d’événement pour qu’il en découle le caractère injuste de la sanction. » Dont acte.

Photos : Moselle Sport - Article publié le 17 avril 2017

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