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Une carrière de sportif de haut niveau : et après ?

Sportif de haut niveau est une profession à part entière, ce que beaucoup de gens oublient bien vite. Ils représentent la France au plus haut niveau international lors des plus grandes compétitions, ce qui les amène à consacrer la majeure partie de leur temps et de leur énergie à leur sport. Seule différence avec les autres professions ? Une retraite précoce qui engendre une reconversion obligatoire.

La formation comme support à la reconversion

Pour assurer sa reconversion, le sportif de haut niveau peut commencer une formation ou reprendre celle qu’ils avaient entamé avant leur carrière sportive pour d’autres. Autre alternative, les formations spécifiques adaptées à leur statut de sportif. En Moselle, Philippe Gonigam, titulaire de diplômes l’amenant à un niveau Bac +4, est à l’initiative de la création de la Moselle Sport Académie, dont l’objectif est de consolider le parcours de formation des jeunes sportifs et la structuration à long terme de leur carrière : « La MSA est un dispositif qui englobe toutes les étapes et facettes de la vie d’un sportif, qui l’accompagne dans tout son parcours. » Autre implication du champion de France du 400 mètres haies en 1986, qui est désormais directeur de l’Élite à la Fédération Française d’Athlétisme, la création du diplôme universitaire de management d’une carrière de sportif professionnel à l’Université de Strasbourg. Ayant lui-même été dans une dynamique de reconversion à la fin de sa carrière dans les années quatre-vingt-dix, il sait de quoi il parle : « Dans la mise en place du dispositif, il y a eu tout un cheminement qui démarre par un parcours personnel. Lors d’une reconversion, on est confronté à un vrai recommencement, on repart de zéro. Quand on se réoriente, on a avec nos collègues de la même tranche d’âge, 8 à 10 ans de retard. »

Une phase transitoire empreinte d’incertitudes

Même pour les sportifs qui ont connu une reconversion couverte de succès, à l’instar de Tony Kurbos – ancien Grenat auteur d’un triplé au Nou Camp face au FC Barcelone en 1984, aujourd’hui à la tête d’une entreprise d’importation de voitures allemandes de luxe – la transition n’est jamais aisée et parfois déstabilisante. L’après-carrière sportive est une phase de transition difficile à gérer tant sur le plan moral que physique comme l’assure Philippe Gonigam : « Les deux sont liés. Le sport est une pratique intense. Quand on s’arrête, cela engendre des bouleversements affectant le sommeil, l’alimentation… Il faut savoir que c’est une vie marginale entraînant un stress permanent. Quand on est sportif, on a toujours un objectif en tête qui nous guide à travers tout ce qu’on fait, il y a un réel enjeu. Cela peut être très gratifiant si l’on arrive au bout de son objectif et très éprouvant dans le cas inverse. » Un stress permanent qui, lorsqu’on se retire, peut s’accompagner d’une perte de repères mais aussi pour certains, d’un retour à l’anonymat difficile à accepter.

Préparer sa reconversion conjointement à sa carrière sportive : une ambition irréaliste ?

Il est donc important d’anticiper et de préparer sa reconversion pendant sa carrière. Une donnée difficilement compatible avec la performance et le calendrier des élites. Là est le paradoxe de la situation dans laquelle ils se trouvent. Même s’il ne néglige pas la difficulté que peuvent rencontrer certains de ses collègues, Imaad Hallay dédramatise la situation : « À la fin de ma carrière sportive, je suis tout simplement revenu sur ce qu’était ma vie avant, je l’ai reprise là où elle s’était arrêtée. Dans mon cas, « petite mort » oui mais une mort compétitive. » Ayant démarré une formation universitaire d’ingénieur avant de se lancer dans l’athlétisme, le champion d’Europe du relais 2010, a eu davantage de mal à faire le deuil de la compétition qu’à réussir sa reconversion: « C’est vrai qu’il y a une pratique relativement lourde, pas toujours évidente et parfois même lassante. Quand j’ai arrêté ma carrière, je n’ai pas ressenti de manque de la pratique mais de compétitivité, c’est la compétition qui m’a toujours intéressé. La reconversion est difficile certes mais possible : Il faut se donner les moyens de pratiquer la compétition, et d’évoluer dans le sport qu’on aime sans pour autant occulter tout le reste, pratiquer passionnément mais intelligemment. »

Le sport, toujours le sport

Gérer de front carrière sportive et reconversion professionnelle n’est donc pas chose aisée. La décision de stopper une carrière est rendue difficile par le vécu émotionnel et physique amené par une carrière dans le haut niveau. Car oui, le sport est avant tout une passion. C’est cette dimension affective qui conduit les anciens sportifs à rester dans le domaine du sport, comme le démontre aujourd’hui Philippe Gonigam. Une reconversion qui se fait souvent dans un souci financier lorsque certains sportifs qui, non préparés, n’ont pas su gérer les ressources apportées par leur carrière sportive : « Bien que bien préparés sur le plan physique, les sportifs n’ont bien souvent pas les compétences nécessaires sur les plans financier et médiatique, qui sont pourtant parties intégrantes de leur statut. »

Photos : DR - Article publié le 9 février 2015

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