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Que devient… Ahn Jung-hwan ?

C’est l’histoire d’un joueur qui aura forgé sa carrière sur un but inscrit en Coupe du Monde… Un but qui fit de lui un véritable héros en Asie… et un paria en Italie. 18 juin 2002, à domicile, la Corée du Sud élimine l’Italie en huitièmes de finale de sa Coupe du monde, devenant ainsi l’une des plus grosses surprises de l’histoire du football.

Et ce, grâce à un homme, Ahn Jung-hwan, méconnu en Europe bien que star au pays, qui, à la 116e minute envoie la Corée du Sud en quarts de finale après un but en or inespéré. « On dit toujours que les buts victorieux ne s’oublient pas et c’est bien vrai. En plus, on se souvient toujours d’un but marqué en Coupe du Monde », raconte le héros de Daejeon. Jamais un but en Coupe du monde n’aura autant fait parlé de lui. Et pour cause, le numéro 19 de la sélection coréenne joue alors pour la modeste équipe de Pérouse… en Italie. Sacrilège pour le président du club, le truculent Luciano Gaucci : « Je n’ai pas l’intention de payer un salaire à quelqu’un qui a ruiné le football italien. » Du jamais vu. Le président de Pérouse est pourtant un coutumier du fait. Luciano Gaucci s’est déjà illustré en recrutant pour une saison Saadi Kadhafi, le fils de l’ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi. Le sprinteur canadien Ben Johnson, convaincu de dopage à l´issue de la finale du 100 mètres des Jeux olympiques de Séoul, s’est chargé des exercices physiques aux joueurs de Pérouse et enfin, il a tenté, en vain, de faire jouer la première femme en Serie A. Ayant un temps envisagé de licencier le « traitre », Ahn rejoint finalement le championnat japonais et Shimizu S-Pulse. « Quand il est arrivé chez nous, c’était une brebis égarée qui n’avait même pas de quoi se payer un sandwich, reprend le président Gaucci. Il est devenu riche sans fournir de prestations exceptionnelles. Il me suffirait de 3 milliards de lires (environ 1,6 million d’euros, NDLR) pour prolonger son contrat et je pourrais faire encore plus de bénéfices en le revendant. Mais je ne le prolonge pas. » Rideau.

 

Après une parenthèse enchantée au Japon, sous les couleurs de Shimizu S-Pulse et de Yokohama F. Marinos, Ahn débarque en France, en juillet 2005, au FC Metz. « Tout joueur asiatique espère un jour participer à une compétition telle que la Ligue 1, explique alors Ahn. Les matches sont retransmis en Orient. C’est l’un des meilleurs championnats européens tout comme l’Espagne, l’Italie… » L’attaquant, frappé dans le dos de son numéro fétiche en sélection, le 19, promet alors monts et merveilles aux supporters grenats. « En tant qu’attaquant, j’ai bien sûr l’ambition de marquer le plus de buts possible pour mon équipe et ainsi lui permettre de gagner des places au classement afin qu’elle soit reconnue au sein de l’élite. Je ne signe pas ici en pensant à participer à la Coupe du Monde. J’ai surtout envie de découvrir ce championnat et de marquer mon passage au FC Metz. » Manqué. Le bilan du Sud-coréen ne restera pas dans les annales (18 matches dont 10 en tant que titulaire, 2 buts) et les promesses de ce « buzz médiatique » n’auront pas l’effet escompté. Philippe Gaillot, à l’origine de son arrivée, y voit pourtant des raisons extra sportives à cet échec : « Lors de l’arrivée de Ahn Jung-hwan en 2005, les conditions de départ étaient idéales. Vite installé, il habitait à côté de son interprète et ami sud-coréen qui devait l’aider dans son adaptation en France. Après un mois, il se fâche avec son interprète et tout devient compliqué. On ne peut pas maîtriser ce genre de problème. Au final, la saison de l’international sud-coréen n’aura pas été une réussite. Le niveau du joueur n’avait pourtant rien à voir… Preuve en est, il a fait la Coupe du Monde suivante en 2006. » 

 

La somme de tous ces problèmes contraint l’égérie de marques de cosmétique asiatiques de vendre ses charmes dans l’autre côté du Rhin, à Duisbourg, qu’il rejoint en janvier 2006, six mois seulement après son arrivée en fanfares dan l’Hexagone. Comme à Pérouse et à Metz, Duisbourg est un échec (12 matches, 2 buts). Las, il refuse de signer en Angleterre, à Blackburn, et retourne au pays, en Corée du Sud, au Suwon Bluewings. « Mes passages en Europe ne sont pas de échecs selon moi, précise Ahn Jung-hwan. Le football européen est très différent du football asiatique et n’est pas forcément adapté à un joueur comme moi. Je ne regrette pas mes signatures en Italie, en France et en Allemagne. Mais c’est évident que c’est en Asie que vous avez pu voir le vrai Ahn. » Suwon puis Busan en Corée du Sud avant une dernière pige, en Chine, à Dalian durant trois ans. En janvier 2012, il annonce par le biais d’un communiqué de presse qu’il arrête sa carrière. « Au cours de ma carrière de 14 ans, ma famille a fait beaucoup de sacrifices (il est marié à une ancienne Miss Corée Lee Hye-won depuis 2001, NDLR). Je veux passer plus de temps avec eux et juste être un père normal. J’ai travaillé dur durant ma carrière et je sentais que je pouvais encore jouer. Mais d’un autre côté, je sentais la pression et je ne savais pas si je pouvais atteindre ce que les gens attendaient de moi. » Ahn Jung-hwan ou l’histoire d’un joueur qui eut, il y a dix ans, deux heures de gloire…

Photos : DR - Article publié le 7 novembre 2012

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